Défricheurs du social
Défricher le social au grand air plutôt que cultiver son jardin bien à l’abri : ainsi pourrait-on résumer le désir porté par ce blog, animé par les membres du pôle Etudes & Prospective du Centre Etudes & Data du Groupe Alpha et ouvert aux contributions des consultants et des partenaires du Groupe. Sans réponses préconçues mais avec l’intention de proposer des réponses pertinentes, le blog abordera, dans un esprit de controverse argumentée et productive, la diversité des questions couvertes par le champ social.
Un plan jeunes ambitieux mais insuffisant contre la précarité
Sur les 100 milliards d’euros du plan France Relance, 6,5 milliards d’euros sont consacrés spécifiquement aux jeunes. Mises en œuvre sur deux ans, ces mesures visent à soutenir l’arrivée prévue de près de 800 000 jeunes sur le marché du travail en septembre 2020 face à la destruction de 800 000 emplois prévue d’ici la fin de l’année. Le plan jeunes représente un financement massif. Ses mesures couvrent une large palette de situations et vient à répondre à des besoins de soutien immédiats. Toutefois, son manque d’articulation avec le reste du plan de relance interroge et l’absence d’un filet de sécurité ne permettra pas à de nombreux jeunes d’éviter de basculer dans la pauvreté.
L’accord budgétaire européen, un moment fédéral
Le plan de relance français, qui sera présenté le 3 septembre, s’élève à 100 milliards d’euros. Une partie de ces dépenses sera financée par des fonds européens issus de l’accord budgétaire conclu le 21 juillet. Cet accord porte sur le budget de l’Union pour la période 2021-2027 et sur un plan pour la relance, baptisé Next Generation EU. Celui-ci s’ajoute au plan de crise décidé en avril (le Pandemic Crisis Support) et représente un montant de 750 milliards, composé de prêts pour 360 milliards d’euros et de subventions pour 390 milliards d’euros. Cet accord est historique car il instaure un principe de mutualisation des dettes et de solidarité budgétaire temporaire sous forme de transferts aux États. Il reste néanmoins limité compte tenu de l’ampleur de la récession. Il s’agit d’un accord de crise qui n’évitera pas le fait que la relance passe par l’endettement des États.
Sortie de crise : de nouvelles formes de mobilisation de l’épargne à inventer
Selon l’OFCE, les Français auraient accumulé une épargne forcée de 55 milliards d’euros en huit semaines de confinement. Leur revenu est souvent maintenu alors qu’une bonne part de leurs occasions de dépenses s’est tarie. Dans le même temps, l’Etat et les organismes sociaux envisagent un dérapage budgétaire d’au moins 115 à 150 milliards d’euros combinant pertes de recettes fiscales et sociales, et mesures de soutien à l’emploi (chômage partiel, garde d’enfants, etc.) ou aux entreprises (différés et allègements de charges). Au-delà du recours immédiat à l’endettement, à des taux heureusement très favorables, se pose donc la question de la mobilisation de l’épargne intérieure. Plusieurs scénarios sont envisageables, dont les effets peuvent fortement différer.
En sortie de crise, quelles solutions pour l’emploi ?
Après le déconfinement, une relance de la production économique devra s’organiser, et avec elle un retour à l’emploi des travailleurs ayant perdu leur poste, ou le retrouvant après une longue suspension. Dans le débat public sont apparues rapidement des exhortations au « travailler plus » sous trois formes : une hausse du temps de travail via une réduction des jours de congé et de réduction du temps de travail (RTT), une baisse des salaires, une remise en cause des 35 heures. Faire travailler plus les salariés en emploi est alors présenté comme une mesure de bon sens. Nous verrons au contraire qu’il n’en est rien et que le retour de ces antiennes n’a pas lieu d’être considéré.
Du confinement à l’après coronavirus, améliorer l’encadrement collectif du télétravail
L’entrée en vigueur du confinement s’est traduite par une progression spectaculaire du télétravail. Alors que 3% des salariés pratiquaient le télétravail en 2017, celui-ci concernerait désormais un quart des salariés (DARES enquête ACEMO avril 2020), conduisant à une pratique massive et soudaine, exercée en dehors de tout encadrement. Les entreprises déjà couvertes par un accord de télétravail, qui représentaient 1% des salariés en 2017, peuvent en revanche s’appuyer sur ce cadre mais elles sont contraintes de ne l’appliquer que partiellement en raison du confinement. Cette situation soulève un certain nombre de questions. Dans la perspective d’un développement du télétravail, une amélioration de son encadrement collectif apparaît nécessaire. Celle-ci prendra des formes différentes selon les entreprises : détermination de règles de fonctionnement dans les entreprises qui n’y recouraient pas jusqu’à maintenant ; prise en compte de certaines limites et de blocages constatés à l’occasion du confinement dans les entreprises déjà couvertes par un accord.
Chômage partiel : pour une acquisition de droits à retraite au régime général
L’activité partielle ne permet pas d’acquérir de droits à la retraite au régime général, excepté pour le cas particulier de l’indemnité complémentaire éventuellement versée par l’entreprise pour les salaires supérieurs à 4,5 SMIC. Cette situation n’est pas logique car le chômage permet d’acquérir des droits au régime général, ce qui est également le cas de l’activité partielle dans le régime complémentaire Agirc-Arrco. Pour de nombreux salariés, il pourrait en résulter une baisse du montant de la pension qui toucherait davantage les salariés les plus modestes. C’est pourquoi, dans la logique de l’Agirc-Arrco, nous proposons un régime d’acquisition de droits à retraite reposant sur une validation de trimestres et des salaires portés au compte sur la base du salaire perdu.
Les conditions pour une sortie de crise réussie
La sortie de la crise économique actuelle dépendra de l’attitude des acteurs économiques de terrain et de leurs anticipations. Cette sortie de crise reste à inventer, ou du moins à mieux baliser. Deux enjeux nous paraissent devoir être mieux éclairés pour esquisser un redémarrage efficace et si possible rapide de la machine économique. Le premier est financier et concerne l’orientation du crédit pour lequel il est nécessaire de s’affranchir des notations. Le deuxième est productif et concerne la consolidation de filières interdépendantes et morcelées.
Coronavirus : quels effets sur le chômage ?
La pandémie de Covid-19 en cours affecte fortement l’activité économique et fragilise la situation des salariés. Les mesures de confinement général édictées dans de très nombreux pays d’Europe et du monde se traduisent par un arrêt au moins partiel des activités économiques. Les premiers chiffres de chômage disponibles montrent une augmentation très forte dans certains pays (USA, Canada, Russie, Inde, Norvège, etc.). En Europe, de nombreux pays ont recouru massivement au chômage partiel. Si, jusqu’à présent, l’emploi a été globalement préservé, plusieurs conditions devront être remplies pour contenir les destructions d’emplois à l’issue de l’épidémie. Parallèlement, des mesures de lutte contre le chômage et de soutien aux demandeurs d’emploi seront nécessaires.
L’Europe à l’épreuve du coronavirus
La pandémie de Covid-19 représente un défi sans précédent pour les pays européens et un choc majeur pour l'économie du continent. Face aux difficultés des pays membres, la réponse à la crise a tout intérêt à être européenne, massive et coordonnée. Mais pour l’instant, les mesures prises sont limitées et certains pays affichent peu de solidarité. Pourtant, l’Europe, déjà fragilisée par le Brexit et par les tensions nationalistes, joue probablement son avenir lors de cette crise.
Deux paradigmes concurrents pour l’après-coronavirus ?
Alors que la crise du coronavirus s’installe pour durer, on constate des registres de discours très distincts dans la manière de penser les futures solutions, destinées à nous projeter dans l’après-coronavirus. Derrière certains types de mesures d’urgence, se profilent des visions du monde diamétralement opposées, selon deux dimensions d’arbitrage. La première de ces dimensions concerne le rapport hommes-technologies. La seconde, qui lui est directement liée, renvoie aux conceptions de l’espace et du temps dans lequel reconfigurer notre monde. Ce billet propose de comprendre à quel registre elles renvoient et quelle vision de l’avenir elles convoquent.